GRAMMAIRE ET ENSEIGNEMENT bu FRAN<;AIS, 1500-1700. Edite par Jan de Clercq, Nico Lioce, Pierre Swiggers; Monographie publiee par le Centre internatio­nal de dialectologie generale (Louvain) ; Peeters, Leuven-Paris-Sterling, Virginia, 2000,,XXXJV+ 671 pp. (ORBJS/SUPPLEMENTA, t.16). Ce vaste recueil de reflexions theoriques sur la didactique du frarn;:ais langue etrangere (FLE) au XVIe et XVIIe siecles dans differents pays europeens enrichit de maniere considerable l'historiographie de l'enseignement de cette langue qui dispu­ta le statut de la lingua franca au latin pour le ceder bien plus tard al'anglais. La monographie se joint aux efforts de la Societe pour l'Histoire du Fran9ais Langue Etrangere ou Seconde (SIHFLES). L'accent est mis sur la production didactique accompagnant l'enseignement aux etrangers ce qui explique l'absence de l'analyse r_eiteree des oeuvres essentiellement grammaticales telles que L'Esclarcissement de la langue fran9oyse de John Palsgrave. Les auteurs des contributions portant dans un premier chapitre »general« sur les questions de methodologie, et dans les suivants sur l'enseignement de FLE en Scandinavie, aux Pays-Bas, dans la Region rhenane, en Europe centrale, dans la Pen­insule iberique et en Italie, soulignent avant tout l'influence que la tradition greco­latine continue aexercer dans les manuels etudies. C'est le modele dit ascendant qui d'apres Donat (Aelius Donatus, pedagogue du !Ve s. et maitre de saint Jerome) presente dans la description grammaticale la structure suivante : -une partie grapho-phonetique et une partie morphologique -l'accent est mis sur la morphologie disposant de huit (ou neuf) parties du dis­ cours, decrites en termes d'accidents: espece, figure, nombre, genre, cas, mode, temps, personne etc. Les definitions sont de nature semantico-formelle. Ceci signifie plus ou moins que seront rarissimes les grammaires de l'epoque analysee lesquelles sortiront du cadre de la grapho-phonetique (comparaison de la prononciation frarn;aise avec celle de la langue maternelle) et du transfert des partes orationis latines aux parties du discours franvaises ; elles consacreront une partie tres limitee a la syntaxe. Les exceptions sont La Grammatica Ga/lica de Serius ( cf. P. Swiggers, pp.425-459) et surtout l'adaptation de la Parfaite grammaire royale de Des Pepliers par J. Th. Jablonski (petit-fils de l'humaniste tcheque Comenius) qui con­nut un grand succes aupres du puhlic germanophone et fut traduite en ruse et en suedois. Les constatations interessantes, _voire surprenantes sont liees al'aspectfonction­nel des manuels traites, tantot sur le plan de l'assimilation du franvais en vue de la communication (modeles conversationnels et epistolaires), tantot sur celui du lex­ique thematique repertorie selon une demarche onomasiologique, suivant la tradi­tion des nominalia medievales. 172 Le caractere contrastif de certains enseignements se fait valoir ason tour, si bien pour les differences de prononciation que pour la description simultanee de deux ou trois langues dans les grammaires paralleles. Ces deux approches assez «modernes» apparaissent avant tout aux Pays-Bas et en Europe centrale (cf: les contributions de Dodde-Essenboom, F. Claes, J. De Clercq, B. Kaltz, P. Swiggers et J. A. Caravolas). L'enseignement tout afait revolutionnaire, le »grand tour«, consistait aenvoyer unjeune Anglais du XVIIe s. en France pour un sejour qui pouvait durer d'un atrois ans : cette approche favorisait done l'apprentissage par immersion (cf. l'exemple du lexicographe James Howel dans l'article de D. Kibble). La monographie est sans aucun doute une etude tres enrichissante qui ne man­quera pas d'interesser ni didacticiens ni grammairiens ni theoriciens purs. C'est une preuve de reussite dans une vaste entreprise de specialistes menee par un competent groupe de rectacteurs en chef. Vladimir Pogačnik 173