cz > CI C. G r r r n c p Tone Kuntner JABLANA-LE POMMIER Tone Kuntner JABLANA-LE POMMIER Dvojezična izdaja pesmi Toneta Kuntnej / Edition bilingue des poésies de Tone Kuntner, Jablana / Le Pommier Izdalo in založilo / Publiée par : Društvo Slovencev v Parizu / Association des Slovènes de Paris Izzid publikacije sta omogočila: Urad RS za Slovence v zamejstvu in po svetu in Studio PRINT d.o.o. Slovénie Réalisé grâce au soutien financier de l'Office slovène chargé des Slovènes à l'étranger et Studio PRINT d.o.o. Ljubljana, Slovénie Naslovnica / Couverture : Rudi Španzel Društveni logo / Logo associatif : Robert Janez Uredila / Rédactrice : Ana Stegu Vičič Oblikovanje / Mise en page : Dorian Španzel Tisk / Impression : Studio PRINT d.o.o. Slovénie, 2013 Naklada / Tirage : 200 exemplaires CIP - Kataložni zapis o publikaciji Narodna in univerzitetna knjižnica, Ljubljana 821.163.6-1 KUNTNER, Tone Jablana = Le pommier / Tone Kuntner. - Dvojezična izd. = Ed. bilingue. - [Chatillon] : Association des Slovènes à Paris : Društvo Slovencev v Parizu, 2013 270047232 Avant-propos de l'éditeur : Ana Stegu Vičič, Lucie Škrlj-Fernandes..............4 Préface : prof. Edvard Kovač....................6 Traduit par Ana Stegu Vičič : Le pommier............................9 Traduit par Alenka Zver : Cette lumière....................................................11 Tu as joué avec le feu............................................13 Je creuse un puits ..............................................15 Je trace des chemins......................17 Je suis malade..........................19 Tu marches...........................21 Ma maison...........................23 Doucement l'arbre se courbe.................25 Je plante un arbre........................27 Je construis ma maison....................29 La route m'entraîne......................31 Traduit par Liza Japelj Carone : Quel est ce démon ?......................33 Poème plaintif.........................35 Le poème du peintre......................37 Au début tu es une graine...................39 Quand le matin naquit....................41 Je sais que je t'aime.......................43 Je me sens mal.........................45 Paysan en ville.........................47 Traduit par Edvard Kovač : Regarde, quelle lumière....................49 Traduit par Nina Medved et Yves Petit, Antenne slovène de la Maison de la poésie à Tinqueux : La nature sauvage a conquis les champs...........51 »Que m'importent toutes les philosophies ! Le soleil brille joyeusement dans le ciel !« a écrit le poète Tone Kuntner dans son poème Le Pommier qui porte le fardeau des années accumulées de tout être humain. À la suite de son passage à Paris en juin 2013, l'Association des Slovènes de Paris a souhaité rendre hommage au poète slovène Tone Kuntner en publiant en édition bilingue une vingtaine de ses poèmes. Ces poèmes de l'illustre Tone Kuntner avaient étés traduits et présentés au public français et slovène, lors de deux rencontres organisées à Paris au P.E.N. Club français et à Châtillon au sein de la communauté slovène, en juin 2013, au cours desquelles l'auteur a fait vibrer le coeur du public français et slovène. Cet ouvrage inédit, en version bilingue, peut être considéré comme un cadeau précieux fait à celles et ceux qui le découvriront. C'est un voyage initiatique culturel et poétique qui est proposé à la fois au lecteur français mais aussi aux descendants des Slovènes établis en France. A cette occasion, nous remercions vivement toutes les personnes qui par leur travail bénévole, nous ont aidé à la réalisation de cet ouvrage (notamment les traductrices : Mesdames Alenka Zver, Liza Japelj Carone et Nina Medved, et les traducteurs : Monsieur Yves Petit et le Père Edvard Kovač). La publication de cette édition a été en effet possible grâce à l'aide bénévole. Nous témoignons aussi notre reconnaissance à l'Office slovène chargé des Slovènes à l'étranger pour son soutien financier dans cette initative ainsi qu'au studio Print d.o.o. Ljubljana. Enfin, l'illustration de la couverture de ce livre bilingue Le pommier nous a été gracieusement proposée par Rudi Španzel, peintre slovène et la mise en page par Dorian Španzel, à qui nous adressons nos plus vifs remerciements. Bon voyage poétique à toutes et tous. Ana Stegu-Vičič, présidente et Lucie Škrlj-Fernandes, vice présidente Association des Slovènes de Paris Društvo Slovencev v Parizu De l'anticonformisme paysan après la guerre à la déchirure de l'âme postmoderne. Tone Kuntner est né en 1943 dans une région pittoresque de Slovénie, près de la frontière autrichienne. Il est devenu comédien de théâtre et acteur de cinéma slovène. Toute sa vie il resta fidèle au « Théâtre de la Ville » de Ljubljana. De même il enseigna à l'Académie de Théâtre et, durant des années, créa un programme culturel à la Télévision nationale slovène. Très tôt il se mit à écrire des poèmes. Sa poésie fut d'abord empreinte de nostalgie envers sa terre natale et son enfance. On oublie que la poésie officielle de l'époque devait être dans son pays très moralisatrice et prolétarienne. C'est pourquoi Tone Kuntner, prônant la vie authentique des paysans et l'intimité avec la terre, a été d'abord perçu comme un contestataire, voire comme un nonconformiste. Et pourtant sa langue si mélodieuse sait nous dévoiler la beauté des choses les plus simples. Par exemple, son premier recueil a pour titre : Le pain quotidien. Le poète souhaite entrer dans le mystère de la nature pour comprendre le coeur humain qui est pour lui aussi à la fois sauvage et généreux. D'où le titre de son célèbre recueil : Pommier Sauvage (Lesnika), qui représente pour lui la vie sous toutes ses formes, un vrai pommier des bois. Cependant, très tôt, le poète exprime à la fois le sens tragique de la vie et une aspiration vers l'amitié de tous les hommes. Il prône un nouveau cosmopolitisme de tous les êtres vivants. Chez Kuntner nous trouvons un mélange inhabituel parce que son sens tragique alterne constamment avec une lueur d'espérance. Tel il reste jusqu'à son dernier souffle, osant espérer pour son peuple, même dans les moments les plus difficiles de son histoire. Il se présente ainsi à nous également dans son dernier recueil La semence des songes (Podorane sanje). Tone Kuntner a édité plus de vingt recueils de poésie qui ont, à plusieurs reprises, été couronnés par des prix littéraires. Il a déjà été traduit et édité en français, allemand, anglais, italien, hongrois, serbe et croate, macédonien, russe, roumain et géorgien. Cette année il a fait, avec succès, une lecture de ses poésies au Centre de P.E.N. Club Français à Paris. Puisse ce langage poétique, qui est aussi la langue universelle de la profondeur de l'âme humaine, nous faire mieux comprendre la souffrance et les songes du coeur slovène ! Edvard Kovac Jablana Kaj mi vse filozofije! Z neba veselo sonce sije. Sije, da poji cvetove. Sije, da zori sadove. Sonce sije in se smeje. Joj, vse težje so mi veje! Le pommier Que m'importent les philosophies ! Le soleil brille yoyeusement dans le ciel. Il brille pour épanouir les fleurs. Il brille pour que mûrissent les fruits. Le soleil brille et il rit. Oh, mes branches s'alourdissent de jour en jour. Ta luč Ta luč ni od včeraj in ni samo moja. Ta luč ne gori od danes do jutri, gori in sveti iz davne preteklosti v davno prihodnost. Ta luč je spomin, ta luč je upanje. Nekdo jo je davno nekoč prižgal in je svetila kakor trstenka, kot oljenka, sveča, kot petrolejka, kakor karbidovka, kot plamen, kot kres, kot ogenj v strehi, kot velik požar in kakor žerjavica, ki je velikokrat skoraj ugasnila. A ni ugasnila, ker jo varujemo kot luč svojih oči, ker jo predajamo neugaslo, preden ugasnejo naša življenja. Brez te luči ne bi znali živeti. Brez te luči bi bila tema. Cette lumière Cette lumière ne date pas d'hier et elle n'appartient pas qu'à moi. Cette lumière ne brille pas d'aujourd'hui à demain, elle brille et éclaire depuis la nuit des temps dans un avenir déjà ancien. Cette lumière est mémoire, cette lumière est espoir. Jadis quelqu'un l'a allumée et elle a brillé comme une torche, comme une lanterne, une bougie, un fanal, comme une lampe à huile, comme une flamme, un feu de la St Jean, comme le feu dans la maison, un immense incendie et comme des braises, souvent presque éteintes. Mais elle ne s'est pas éteinte, on la protège comme la lumière de nos yeux et on la transmet avant qu'elle ne s'éteigne, avant que ne s'éteignent nos vies. Sans cette lumière, nous ne saurions vivre. Sans cette lumière régneraient les ténèbres. Igral si se z ognjem Igral si se z ognjem, ko si prvič stopil na prag z velikimi očmi. Igral si se z ognjem, ko si odgovoril na prvi pozdrav, ko si ponudil roko. Igral si se z ognjem, ko si izrekel prvo kletev, ko si potočil solzo. Igral si se z ognjem, ko si opustil svojo pot in se zaprl v hišo. Igral si se z ognjem. Lep in velik plamen je v tvoji strehi. Tu as joué avec le feu Tu as joué avec le feu quandtu as posé le pied sur le palier, les yeux grands ouverts. Tu as joué avec le feu quand tu as répondu au premier salut et tendu la main. Tu as joué avec le feu quand tu as proféré ton premier juron, et versé une larme. Tu as joué avec le feu quand tu as quitté ton chemin pour t'enfermer chez toi. Tu as joué avec le feu Une belle et grande flamme a embrasé ta maison. Kopljem studenec Kopljem studenec, da se do svojih izvirov dokopljem. (Voda z izvirov ni povsem moja, povsem moje je le kopanje). Kopljem studenec za svojo žejo in žejo drugih. Kopljem ga v sušni svet in čas. Je creuse un puits Je creuse un puits pour atteindre mes sources. (L'eau des sources ne m'appartient pas à moi seul, creuser seul m'appartient). Je creuse un puits pour ma soif et la soif des autres. Je creuse un puits dans la sécheresse du monde et du temps. Delam poti Delam poti, gazi skozi sneg, ki je zamedel hišo. Delam poti na vse strani, iz tihe osame do ljudi. Do svojih ljudi, do bližnjih sosedov, da jih povabim h gostiji luči. Je trace des chemins Je trace des chemins, des passages dans la neige, autour de la maison. Je trace des chemins de tous les côtés, depuis ma solitude vers les gens. Jusqu'aux miens jusqu'à mes proches voisins, pour les inviter au festin de la lumière. Jaz sem bolan Jaz sem bolan. Ker ni ravnotežja v meni. Ker je v meni preveč teme ali preveč svetlobe, preveč mraza ali preveč toplote, preveč lepote ali preveč grdote, preveč polnosti ali preveč praznine , preveč hrupa ali preveč tišine. Ker sem slep ali preveč vidim, ker sem gluh ali preveč slisim, ker dajem preveč ali preveč jemljem. Živeti boli. Ne najdem na svetu prave mere, ne najdem na svetu prave poti. Je suis malade Je suis malade. Il n'y a pas d'équilibre en moi. En moi, il y a trop d'obscurité ou trop de clarté, trop de froid ou trop de chaleur, trop de beauté ou trop de laideur, trop de plénitude ou trop de vide, trop de bruit ou trop de silence. Je suis aveugle ou je vois trop bien, je suis sourd ou j'entends trop bien, je donne trop ou je prends trop. Vivre fait mal. Je ne trouve pas dans ce monde de juste mesure, je ne trouve pas dans ce monde de vrai chemin. Ti hodiš Ti hodiš, koder nihče ne hodi, po puščinah in zaraščenih poteh in živiš usodo dreves kot drevo in čujes govorico ptic kot ptica in si kot pes, ko zasluti nevihto. Ti hodiš, koder nihče ne hodi in veš za mir in nemir tega sveta in hvališ radodarnost neba in rodovitnost zemlje in si bogat, bogat kakor gospodar teh širnih polj in te prazne hiše. Tu marches Tu marches là où personne ne marche, dans des lieux déserts et sur des chemins couverts de ronces et tu vis le destin des arbres comme un arbre et tu entends le langage des oiseaux comme un oiseau et tu es comme un chien qui flaire l'orage. Tu marches là où personne ne marche et tu connais la paix et le tourment de ce monde et tu glorifies le ciel pour ses largesses et la fertilité de la terre et tu es riche, riche comme le maître de ces champs infinis et de cette maison vide. Moja hiša Moja hiša razpada, (razžira jo čas), da ni več streha človeku da ni več sanjam zavetje. -Ali je to še moja hiša? Moji bratje živijo daleč od domačije, daleč drug od drugega in vse bolj daleč od sebe. -Ali smo še bratje? Moja dežela se duši v dimu in v lažeh, da ubija upanje v rastlinah in v ljudeh. -Ali je to še moja dežela? Moji prijatelji odhajajo iz moje dežele ali se vdajajo tokovom umazanih rek. -Ali smo še prijatelji? Ma maison Ma maison tombe en ruines (le temps la ronge), elle n'est plus un abri pour personne elle n'est plus un refuge pour mes rêves.- Est-ce encore ma maison ? Mes frères vivent loin de notre maison natale, loin l'un de l'autre et de plus en plus loin d'eux-mêmes.-Sommes-nous encore des frères ? Mon pays étouffe dans la fumée et les mensonges, il tue l'espoir au coeur des plantes et des humains.-Mais est-ce encore mon pays ? Mes amis quittent mon pays ou s'abandonnent aux courants de fleuves salis.-Sommes-nous encore des amis ? Tiho se drevo nagiba Tiho se drevo nagiba, vdano nosi težo dni. Z vsakim dnem so bliže zemlji vse bolj zreli sadeži. Zemlja jim ne gre naproti, zemlja čaka in molči. Čaka, da odpade sadje ali veja zaječi. Doucement l'arbre se courbe Doucement l'arbre se courbe résigné, il porte le poids des jours. Chaque jour se rapprochent de la terre les fruits mûrissants. La terre ne s'avance pas vers eux la terre attend et se tait. Elle attend que les fruits tombent ou que gémisse la branche. Sadim drevo Sadim drevo med korenine svoje domovine, da ga bo zemlja povezala z njo v isto usodo. Da ga bo ista ljubezen pojila, da ga bo ista lepota krasila, da ga bo ista plodnost plodila. Sadim drevo, da z njim izmerim sebe In njo. Je plante un arbre Je plante un arbre entre les racines de mon pays, pour que la terre les unisse dans un même destin. Pour qu'un même amour le nourrisse, une même beauté l'embellisse, une même fertilité l'ensemence. Je plante un arbre pour prendre ma mesure et la sienne. Zidam hišo Zidam hišo s svojo opeko, s svojim lesom ... Zidam jo sam, kakor vem in znam. Da bo streha pred dežjem, zavetje pred mrazom, da bo gnezdo ljubezni. In dokler bo stala ta hiša, bom živel. Je construis ma maison Je construis ma maison avec mes briques avec mon bois... Je la construis seul comme je peux. Pour quelle soit un abri pour la pluie un refuge contre le froid, pour qu'elle soit un nid d'amour. Tant que cette maison sera debout je vivrai. Cesta me žene Cesta me žene, čas me drvi, da se ne morem ustaviti. Glej, na tratah, v poljih ljudi, ki bi jih moral pozdraviti, saj so mi bratje, saj so mi sestre, saj so mi dragi prijatelji. Cesta me žene, čas me drvi v druge kraje, v druge dni. La route m'entraîne La route m'entraîne, le temps me pousse, etje ne peux m'arrêter. Regarde dans les prés et les champs tous ces gens que je devrais saluer. ne sont-ils pas mes frères, ne sont-ils pas mes sœurs et des amis très chers. La route m'entraîne, le temps me pousse versdautres lieux, vers d'autres jours. Nekakšen vrag je v tebi Nekakšen vrag je v tebi, da neprestano v živi ogenj drezaš, da svetlobo iščeš v temi, da ljubiš prepovedane reči; da dvomiš v nedvomno, da verjameš v neverjetno, da segaš za nedosegljivim, in to življenje na zemlji živiš, da bi videl nevidno in slišal neslišno in razumel nerazumljivo... Nekakšen vrag je v tebi, da ne odnehaš preizkušati trdnosti glave in zidu in se ne vežeš z vezanimi in ne vdajaš z vdanimi in ne ponižuješ s ponižnimi -in ne odhajaš z odhajajočimi, temveč ostajaš - z vsem -in navkljub vsemu. Quel est ce démon ? Quel est ce démon en toi qui te pousse à attiser sans cesse le feu vif, à chercher la lumière dans le noir, à aimer les choses interdites à soupçonner l'insoupçonnable, à croire en l'incroyable à tenter de saisir l'insaisissable ; et tu vis cette vie sur terre pour voir l'invisible, pour entendre l'inaudible et pour comprendre l'incompréhensible... Quel est ce démon en toi, qui t'incite sans cesse à tester la solidité de la tête et du mur et à te détacher des liés et à ne pas te rendre avec les rendus et à ne pas humilier les humiliés - et à ne pas partir pas avec les partants, toujours tu restes - envers et contre tout. Tožna pesem Hudič se mudi v moji deželi. Nihče ga ne more tajiti, nihče se skriti pred njim. Hudič se mudi v moji deželi. Hoče se v njej naseliti; hodi po cestah, stezah in poteh... Priseda v vprege in v avtomobile, polega po travnikih, poljih, lesovih, z ognjem gori in dere z vodami, piha in diha s strupenimi sapami, švistne skozi zrak, se zaleze v zemljo, raste z rastlinami, živi v živalih, seda za mizo v domovih in hišah, obseda ljudi, se zagrize v duše, poraja sovraštvo, slepoto, temo. Verni so opustili molitve, neverni so pričeli moliti. Vendar zaman. Nič se ne da spremeniti. Zaman, kakor ta tožna pesem, kakor po toči zvoniti. Poème plaintif Le diable séjourne en mon pays. Nul ne peut le nier, nul ne peut s'en cacher. Le diable séjourne en mon pays. Il veut s'y installer ; Il marche sur les routes, les chemins, les sentiers, les chemins, les sentiers, s'assoit dans les attelages et les voitures, s'étend sur les prés, les champs, les bois, il brûle avec le feu et coule avec les eaux, souffle et respire avec les brises vénéneuses, claque dans l'air, se niche dans la terre, il pousse avec les plantes, s'anime dans les animaux, se met à table dans les foyers et maisons, obsède les gens, morfond les âmes, engendre la haine, l'aveuglement, l'obscurité... Les pieux ont abandonné les prières, les impies se sont mis à prier. Mais en vain. On n'y peut rien. En vain, comme ce poème plaintif, comme sonner les cloches après la grêle. Slikarjeva pesem Danes bi moral naslikati zarjo in oblake rdeče in ptice pod nebom kajti jutri bo drug dan, popolnoma drug. Danes bi moral naslikati cvetje v livadi in žito v polju in brajde zoreče, kajti drugič bo druga pomlad in drugo poletje in druga jesen. Danes bi moral naslikati dekleta v tej pomladi, može v tem poletju, starce v tej jeseni, kajti drugič bodo drugi ljudje, drugi ljudje in drug svet. Le poème du peintre Aujourd'hui je devrais peindre l'aube et les nuages rouges et les oiseaux du ciel car demain sera un autre jour, totalement autre. Aujourd'hui je devrais peindre les fleurs des prés et les blés dans le champ et les vignes qui mûrissent car après, ce sera un autre printemps et un autre été et un autre automne. Aujourd'hui je devrais peindre les filles de ce printemps, les hommes de cet été, les vieillards de cet automne, car après, ce seront d'autres gens, d'autres gens et un autre monde. Sprva si seme Sprva si seme, ljubezen sejavčeva, da te poseje, da te pozabi... Potem si pšenica, zrela za igro z vetrom in s kosci. Potem si nekomu vsakdanji kruh. Au début tu es une graine Au début tu es une graine, l'amour du semeur, il te sème, puis t'oublie... Ensuite tu es le blé, mûr pour jouer avec le vent et les faucheurs. Après tu es pour quelqu'un son pain quotidien. Ko se je porajalo jutro Ko se je porajalo jutro in je bila čista rosa na travi, je bila najina ljubezen kakor čista rosa na travi. Ko je dan dozorel in je bilo sonce visoko na nebu, je bila najina ljubezen kakor sonce visoko na nebu. Ko se je bližal večer in se je dan počasi izgubljal, je bila najina ljubezen, kakor dan, ki se počasi izgublja. Quand le matin naquit Quand le matin naquit et que la rosée fut pure dans l'herbe notre amour fut la rosée pure dans l'herbe. Quand le jour mûrit et que le soleil fut haut dans le ciel notre amour fut ce soleil haut dans le ciel. Quand le soir approcha et que le jour s'évanouit doucement notre amour fut ce jour qui s'évanouit doucement. Vem, da te ljubim Vem, da te ljubim, ker me tvoje veselje veseli, ker me tvoja žalost žalosti, ker me tvoja bolečina boli, ker sem lep od tvoje lepote, ker sem dober od tvoje dobrote. In vem, da me ljubiš ti. Je sais que je t'aime Je sais que je t'aime parce que ta joie me réjouit, parce que ton chagrin me chagrine, que ta douleur me blesse, parce que je suis beau de ta beauté, et que je suis bon de ta bonté. Et je sais que tu m'aimes aussi. Nisem več zdrav Svojim rojakom po svetu Nisem več zdrav, nisem več cel, odkar sem od vas nazaj prišel. Sanjam o vas, v vaših hišah domujem, vaše vrtne gredice negujem, pretihotapljene rože sadim. In tu vaše sanje uresničujem: hodim po vaših rojstnih vaseh -in vaše prazne domove obiskujem. Je me sens mal À mes compatriotes dans le monde Je me sens mal, je ne suis plus moi-même depuis que je suis revenu de chez vous. Je rêve de vous, dans vos maisons je m'installe, vos platebandes je cultive, des fleurs passées en contrebande je plante. Et ici j'accomplis vos rêves : je visite les villages où vous êtes nés - et je m'attarde dans vos foyers abandonnés. Kmet v mestu Med te sive hiše prideš, med te sive hiše zaideš, če iščeš pravico, ali če si hudo bolan. Med temi sivimi hišami je nekje doma hudič. Med temi sivimi hišami ne veš več, kdo si ne veš več, od kod si, in si v množici tisočih sam. Nikar ne poskušaj iskati pravice, nikar ne bodi hudo bolan! Paysan en ville Entre ces maisons grises tu viens entre ces maisons grises tu t'égares, si tu cherches la justice ou si tu es gravement malade. Entre ces maison grises quelque part, le diable est chez lui. Entre ces maisons grises tu ne sais plus qui tu es ni d'où tu viens et dans la foule parmi des milliers tu es seul. Gare à toi si tu cherches la justice ! gare à toi si tu tombes malade ! Glej, kakšna svetloba Glej, kakšna svetloba v najini hiši! V vseh stvareh, ki so tvoje in moje. Kakšna svetloba od ene luči! Kaj bi morala narediti, da se ta luč nikdar ne stemni? Kaj jaz? In kaj ti? Regarde, quelle lumière Regarde, quelle lumière dans notre maison ! Dans toutes les choses qui sont à toi et à moi. Quelle lumière d'un seul astre ! Que faire pour que cette lumière ne ternisse jamais ? Que dois-je faire, moi ? Et toi, que dois-tu faire ? Divje so širna polja zarasla Divje so širna polja zarasla, ki so bila nekoč žitna polja. Le redki ponosno kljubujejo klasi. -Ali so žita divja rast? Stari domovi se ugrezajo v zemljo in stare navade in stari časi. Na njih podrtinah rastejo novi. -Komu domovi? Komu grobovi? Tuji ljudje so jih naselili, s tujim življenjem in govorico. Saj so iz tujih krajev prišli. -Ali smo tujci in prišleki mi? Mi, domačini, ki smo odšli. Po belih cestah v beli svet. In se po njih spet in spet vračamo. -Ali smo le še na cestah doma? La nature sauvage a conquis les champs La nature sauvage a conquis les champs, eux qui étaient autrefois des champs de blé. Seuls de rares épis se rebellent encore avec fierté. -Les blés sont-ils de mauvaises herbes ? Les maisons anciennes s'enfoncent dans le sol et les anciennes traditions et les époques anciennes. Sur leurs ruines en poussent de nouvelles. -Pour qui les maisons ? Pour qui les tombeaux ? Des étrangers s'y sont installés, avec leurs vies et leurs mots d'étrangers. Puisqu'ils sont venus de lieux étrangers. -Ne serions-nous pas les étrangers et les nouveaux venus ? Nous, les gens d'ici qui étions partis. Sur les blanches routes par le blanc monde. Et qui revenons sans cesse sur ces mêmes routes. -Les routes sont-elles notre chez nous ?