Article scientifique original UCD: 342.565.2:341.24 LE ROLE DE LA COUR CONSTITUTIONNELLE DANS LA RESOLUTION DES CONFLITS ENTRE LA CONSTITUTION ET LE DROIT INTERNATIONAL Jadranka Sovdat, Docteur en sciences juridiques, Presidente de la Cour constitutionnelle de la Republique de Slovenie 1. INTRODUCTION' Les Etats regissent differemment les relations entre leurs ordres constitution-nels et le droit international. Les bases principales de ces relations sont sou-vent regies par les constitutions elles-memes. De ce point de vue, la question suivante se pose : un ordre constitutionnel particulier reconnait-il la primaute du droit international ? S'il ne la reconnait pas et si des conflits surgissent entre les deux ordres juridiques, comment ces conflits sont-ils resolus au sein de l'Etat et quelle est l'institution qui joue le role decisif dans leur resolution ? Nous voudrions repondre a ces questions du point de vue de l'ordre constitutionnel de la Republique de Slovenie. La Republique de Slovenie se place parmi les Etats dans lesquels la democratie constitutionnelle1 est etablie. Cela signifie que dans un Etat de droit ou le systeme de la separation des pouvoirs est assuree, la cour constitutionnelle est ap-pelee a poser des limites constitutionnelles au legislateur lorsqu'il regit les relations sociales par une force contraignante. Toutefois, la Cour constitutionnelle slovene (ci-apres : CC) ne veille pas uniquement a la constitutionnalite des lois. * La contribution a etepresentee au 7""e Congres triennal de l'Association des Cours Constitutionnelles ayant en Partage l'Usage du Fran^ais; le Congres s'est tenu a Lausanne, Suisse, les 4 et 5 juin 2015. 1 Cette notion exprime que l'appreciation, si les decisions de la majorite sont cor-rectes, est soumise a une reserve fondamentale : savoir si ces decisions sont conformes a la constitution. W. Hassemer, op. cit., p. 214. En effet, malgre I'existence du systeme judiciaire administratif, elle controle aussi la constitutionnalite (et la legalite) des reglements du pouvoir executif ainsi que la constitutionnalite (et la legalite) des reglements des collectivites locales. Etant donne qu'en Slovenie, le recours constitutionnel est accessible aux particuliers et aux personnes morales, la CC controle egalement les tribunaux, a savoir du point de vue du respect des droits de l'homme et des libertes fondamentales (ci-apres : droits de l'homme).2 En exer^ant toutes ces competences, la CC joue le role de gardien de la Constitution - comme juridiction qui inter-prete la Constitution avec une force juridiquement contraignante.3 Dans le cadre de l'exercice de ses competences, la CC joue egalement un role important dans le maintien du rapport defini par la Constitution entre le droit international et la Constitution. Pour presenter ce role, nous exposerons d'abord la place du droit international dans l'ordre constitutionnel slovene et dans ce cadre, les conflits possibles qui peuvent surgir dans le rapport entre les deux ordres juridiques. Ensuite, nous presenterons brievement les differents types de competences confiees a la CC, afin de pouvoir examiner les differents aspects de son role dans la determination du rapport entre le droit constitutionnel et le droit international. L'examen des questions mentionnees, accompagne des prises de position adoptees a ce jour par la CC dans sa jurisprudence, conduira a la conclusion qui montre que la CC assume un role important a multiples facettes dans le maintien de la relation constitutionnelle entre le droit constitutionnel et le droit international. Ce faisant, elle protege d'un cote la Constitution, tout en permettant, de l'autre, d'assurer la credibili-te de l>Etat en tant que sujet de droit international. 2. LA POSITION DU DROIT INTERNATIONAL DANS L'ORDRE CONSTITUTIONNEL Dans ses dispositions generales (article 8), la Constitution exige que les lois et les reglements subordonnes a la loi soient conformes aux principes gene-ralement etablis du droit international et aux traites internationaux obligeant la Slovenie, et que les traites internationaux ratifies et promulgues soient appliques directement. Dans le chapitre sur la constitutionnalite et la legalite (article 153/II), elle precise que les lois doivent etre conformes aux principes 2 Les competences fondamentales de la CC sont determinees a l'article 160 de la Constitution de la Republique de Slovenie (JO RS nos 33/91-I, 42/97, 66/2000, 24/03, 69/04, 68/06, 47/13 et 75/16 - ci-apres : la Constitution). 3 Comme la CC l'a deja indique dans sa Decision no U-I-163/99 du 23 septembre 1999 (JO RS no 80/99 et OdlUS VIII, 209 ; les decisions importantes de la CC sont disponibles egalement en anglais et publiees sur le site web de la CC ). du droit international generalement etablis et aux traites internationaux en vi-gueur ratifies4 par I'Assemblee nationale (le Parlement slovene) ; les reglements subordonnes a la loi5 et autres actes generaux doivent aussi etre conformes aux autres traites internationaux ratifies.6 Ces deux dispositions constitution-nelles citees determinent le cadre constitutionnel en vertu duquel il est deja possible d'indiquer que dans la Hierarchie des actes juridiques, le droit international est superieur aux lois. En revanche, il ne l'est pas par rapport a la Constitution, parce que cette derniere n'accepte pas la primaute du droit international - la CC s'est expressement prononcee7 sur ce point. Ce faisant, la CC n'a pas fait de distinction entre les differentes sources du droit international. Ceci laisse donc penser qu'elle a considere toutes les sources juridiques internationales comme inferieures a la Constitution. De l'expose ci-dessous, il apparaitra qu'en general une telle conclusion est correcte, bien que dans le detail, quelques exceptions existent. Les traites entrent dans l'ordre juridique interne sur la base de l'entree en vi-gueur de la loi de ratification.8 Toutefois, en depit du fait qu'un des articles 4 Dans la Constitution, le terme « ratification » est employe dans deux sens differents. D'un cote lorsqu'il fixe les competences du President de la Republique (article 107/I, deli-vrance des actes de ratification), il s'agit de l'acte de ratification qui est un acte juridique international (dans le sens du point b) de l'article 2/I de la Convention de Vienne sur le droit des traites) par lequel l'Etat accepte que le traite devienne internationalement contraignant pour lui. De l'autre, les articles 8, 153/II et 160/I concernent la ratification comme acte juridique interne : l'approbation du traite et l'adaptation de la legislation per-mettant au traite de produire ses effets en droit interne - lorsque le parlement autorise la ratification du traite par une loi speciale qui en Slovenie est appelee loi de ratification (voir l'Avis de la CC no Rm-1/97 du 5 juin 1997, JO RS no 40/97 et OdlUS VI, 86). 5 Cette expression designe les reglements du pouvoir executif (decrets du gouvernement et arretes des ministres), les reglements subordonnes a la loi des autres pouvoirs ainsi que les reglements des collectivites locales. Ces derniers reglent les affaires locales qui concernent les habitants de la municipalite et qui relevent de la competence de la munici-palite. Il s'agit de competences, dites originaires, de la municipalite qui puise directement de la Constitution (article 140/I) le fondement permettant la reglementation normative de ces affaires. 6 La Loi sur les affaires etrangeres (JO RS nos 45/01 et suivantes) determine quels trai-tes sont ratifies par le gouvernement (par decret) ; ils sont notamment limites a l'execution de sa competence dans l'ordre juridique interne, aux traites necessaires pour l'application des traites deja signes ou des actes contraignants des organisations internationales, ainsi qu'a la reglementation des relations diplomatiques et consulaires (article 75/IV). 7 La CC l'a indique dans son Avis no Rm-1/97. Un argument en faveur de la primaute de la Constitution est aussi la possibilite d'appreciation a priori de la constitutionnalite d'un traite avant son incorporation dans l'ordre juridique interne. 8 Dans ce contexte, la recente doctrine ne parle plus d'approche moniste ou dualiste concernant le rapport entre le droit international des traites et le droit interne, mais elle parle « d'incorporation ad hoc des regles internationales ». En se referant a la difference de la loi de ratification resume le texte du traite, ce dernier n'obtient pas le statut de la loi.9 Le traite continue d'exister en tant que traite international et sa validite dans la hierarchie des actes juridiques est celle determinee par la Constitution, c'est-a-dire que (en regle generale) le traite est inferieur a la Constitution et superieur a la loi. La CC a attribue aux traites ratifies par decret gouvernemental (ci-apres : decret) une position superieure a celle des autres decrets adoptes par le Gouvernement.10 En effet, dans la hierarchie interieure les decrets doivent etre conformes a la loi (article 153/III de la Constitution). En revanche, il semble que pour les traites ratifies par decret une telle exigence n'existe pas.11 Mais ceci n'entraine pas en meme temps l'exigence que les lois soient conformes a ces traites. Dans ce sens, l'article 153/II de la Constitution concretise plus en detail la disposition generale de l'article 8 et exige clairement que les lois soient conformes uniquement aux traites ratifies par l'Assemblee nationale. Etant donne que les traites ratifies par decret sont le plus souvent signes afin de mettre en reuvre les traites ratifies par la loi, il ne devrait pas y avoir (au moins en regle generale) de divergences entre ces derniers et les lois. Toutes les sources du droit international ne sont cependant pas inferieures a la Constitution. Nous pouvons constater cela pour les « principes du droit international generalement etablis » ou pour les « principes du droit international » mentionnes dans la Constitution aux articles 8, 153/II et 160/I. Dans la doctrine, ces deux expressions sont le plus souvent considerees comme sy- d'incorporation legislative d'A. Cassese sur l'incorporation ad hoc legale et sur l'incorpo-ration ad hoc automatique, Mme Škrk, ancienne juge et vice-presidente de la CC, place la procedure slovene dans l'incorporation ad hoc automatique. Voir M. Škrk, op. cit. 2007, pp. 279-280. 9 Cf. Ordonnance de la CC no U-I-197/97 du 21 mai 1998 (OdlUS VII, 93). 10 Ceci peut etre deduit de l'Ordonnance no U-I-376/02 du 24 mars 2005 (JO RS no 46/05 et OdlUS XIV, 17), dans laquelle la CC a refuse de controler la legalite d'un traite ratifie par decret. La CC a expressement admis la possibilite que la loi et le traite ratifie par decret pouvaient presenter une non-conformite mutuelle et elle a specifiquement in-dique que dans un tel cas, elle ne se prononcerait sur le traite que dans le cas ou il s'agirait d'une non-conformite mutuelle qui violerait les principes de l'Etat de droit de l'article 2 de la Constitution. Meme la conformite entre les lois n'est controlee par la CC que si des dispositions legales s'opposent a ce point les unes aux autres (sont en antinomie) que cela pourrait porter atteinte aux principes de l'Etat de droit. Voir, par exemple, la Decision no U-I-299/96 du 12 decembre 1996 (JO RS no 5/97 et OdlUS V, 177). La juge Mme Škrk a attribue au traite ratifie par decret une position egale a la loi (voir l'opinion concordante de la juge Mme Škrk dans l'Ordonnance no U-I-376/02). 11 De cette maniere, la CC a modifie sa prise de position de la Decision no U-I-147/94 du 30 novembre 1995 (JO RS no 3/96 et OdlUS IV, 118), dans laquelle elle estimait que la position du traite ratifie par le decret en cause etait inferieure a la Constitution et la loi. nonymes et interpretees au sens large.12 Le point de vue partage est qu'il faut reconnaitre la position supraconstitutionnelle de ces principes generaux du droit international qui protegent les valeurs fondamentales du droit, humani-taires et civilisatrices, et interpreter les principes constitutionnels et les droits fondamentaux en conformite avec ces principes.13 Puisque, comme M. Petrič l'ecrit,14 les principes generaux de droit (general principles of law) reconnus comme source de droit international sont les principes fondamentaux du droit et des normes les plus generales des ordres juridiques internes que les Etats ap-pliquent pour regir les relations internationales - nous pouvons partager l'avis selon lequel il est difficile d'imaginer en pratique des cas de collision entre eux et les principes constitutionnels fondamentaux.15 Compte tenu de cela, nous constatons que dans la hierarchie des normes, de tels principes peuvent etre consideres comme situes au niveau constitutionnel puisqu'ils sont reconnus aussi comme les principes constitutionnels sur lesquels un Etat de droit, sou-verain et democratique, est fonde et existe en tant que membre a part entiere de la communaute internationale. La Constitution ne regit pas specifiquement les traites portant sur les droits de l'homme. Malgre cela, ces traites occupent une place particuliere. L'article 15 de la Constitution regit les principes concernant l'exercice et la limitation des droits de l'homme. Parmi ces principes, le cinquieme paragraphe de cet article de la Constitution precise qu'il n'est permis de limiter aucun des droits de l'homme definis dans les actes juridiques en vigueur en Slovenie sous pre-texte que la Constitution ne les reconnait pas ou ne les reconnait que dans une moindre mesure. Les traites regissant les droits de l'homme sont aussi des actes juridiques en vigueur en Slovenie. Si d'un cote, la Constitution ne 12 Voir A. Graseli, Commentaire a l'article 8, dans : L. Šturm (red.), op. cit. 2002, p. 141. Selon Mme Škrk, il faut chercher le sens de ces principes dans le droit international. Parmi eux, elle mentionne les principes generaux du droit international au sens strict du terme (les principes du droit international strictu sensu comme, par exemple, le principe d'accomplissement des obligations internationales in bona fide), les principes generaux de droit reconnus par les nations civilisees (comme, par exemple, lex certa, res iudicata) et les regles du droit international coutumier. M. Škrk, op. cit. 2007, pp. 282-283. 13 M. Škrk, op. cit. 2012, p. 1106. En fait, la question de l'eventuelle valeur supraconsti-tutionnelle des principes generaux de droit n'a pas encore ete expressement traitee par la CC, tandis que la Cour supreme de la Republique de Slovenie a adopte un point de vue di-rectement oppose a celle presentee dans la doctrine. Ä savoir : la Cour supreme est d'avis que les principes du droit international (et du droit international coutumier) font partie de l'ordre juridique slovene s'ils ne sont pas contraires a la Constitution ; cette opinion a ete presentee par la Cour supreme dans le jugement no II Ips 55/98 du 9 octobre 1998 et aussi dans le jugement no II Ips 449/2007 du 10 janvier 2008. 14 Voir E. Petrič, op. cit., p. 214. 15 U. Umek, Commentaire a l'article 8, dans : L. Šturm (red.), op. cit. 2011, p. 133. regit pas du tout un certain droit de I'homme, le traite sera done applique au-tomatiquement. Si de I'autre, la regulation d'un droit de I'homme existe dans les deux ordres juridiques mais n'est pas la meme, dans le cas d'une collision entre les deux, la norme constitutionnelle doit etre ecartee a la faveur de la norme du droit international si cette derniere assure un niveau de protection de ce droit de l'homme plus eleve que la Constitution. Le cas echeant, la norme internationale prevaut16 sur la norme constitutionnelle.17 Par contre, si la Constitution assure une protection plus elevee du droit de l'homme que le traite, elle prend evidemment la premiere place. Nous pouvons donc parler du principe de protection maximale des droits de l'homme qui requiert soit la protection basee sur la Constitution, soit la protection basee sur le traite, selon le niveau de protection des droits de l'homme. Considerant ce qui precede, la question est de savoir si les traites qui assurent un certain droit de l'homme dans une plus large mesure que la Constitution occupent une position supraconstitutionnelle. Jusqu'a present, la CC ne leur a pas reconnu cette place dans sa jurisprudence, mais elle a decide que les trai-tes regissant les droits de l'homme relevent, precisement en vertu de l'article 15/V de la Constitution, du niveau constitutionnel.18 Nous pouvons soutenir ce point de vue puisque selon la regulation et le niveau de protection du droit de l'homme concerne c'est soit la Constitution soit la norme du droit international qui prevaut et cela sur la base du principe etabli par la Constitution elle-meme. Le plus important est que la protection constitutionnelle est assuree non seulement pour les droits de l'homme garantis par la Constitution, mais aussi pour les droits de l'homme garantis par les traites. La Slovenie est un Etat membre de l'Union europeenne (ci-apres : UE) qui est une institution supranationale particuliere creee sur la base des traites par lesquels des Etats lui ont transfere l'exercice d'une partie de leurs droits souverains. Bien que la Constitution ait ete modifiee precisement a l'entree du pays dans l'UE, un article dit « europeen » n'y a pas ete expressement in- 16 L'ancien juge et vice-president de la CC, M. Ribičič indique que dans le domaine des droits de l'homme on ne devrait pas parler de regles « superieures » et « inferieures », mais de leur equivalence mutuelle et de leur concurrence ; pour cette raison, la regle qui du point de vue du niveau de protection du droit de l'homme concerne est la plus exigeante devrait etre utilisee. C. Ribičič, op. cit., p. 111. 17 Cela ne se produit qu'exceptionnellement, car la Constitution slovene contient un large catalogue des droits de l'homme et elle assure parfois un niveau de protection des droits de l'homme plus eleve que les instruments internationaux. Par exemple, le droit de recours et de ce fait le droit au controle de toutes les questions de fait et de droit devant la juridiction d'instance est assure par l'article 25 de la Constitution a l'encontre de toute decision d'une autorite d'Etat ou locale ou d'un detenteur de mandats publics. 18 La CC dans l'Ordonnance no Up-43/96 du 30 mai 2000 (OdlUS IX, 141). clus. En effet, avec le nouvel article 3a de la Constitution, les regies concer-nant le transfert de l'exercice d'une partie des droits souverains aux organisations internationales sont fixees de maniere abstraite sans qu'il soit precise quelles sont les organisations internationales en question.19 Un traite relatif au transfert d'exercice des droits souverains doit etre ratifie a la majorite des deux tiers des votes de tous les deputes, c'est-a-dire a la majorite par laquelle la Constitution peut etre modifiee. L'article 3a/I de la Constitution permet le transfert de l'exercice d'une partie de la souverainete de l'Etat uniquement aux organisations internationales fondees sur le respect des droits de l'homme, la democratie et les principes de l'Etat de droit. Au troisieme paragraphe de l'article 3a, elle determine que les actes juridiques et les decisions adoptes dans le cadre de telles organisations sont appliques conformement a l'ordre juri-dique de ces organisations. Sur cette base, certains auteurs ont estime que c'est precisement cette disposition qui, dans le cas de l'UE, assure l'applica-bilite directe du droit europeen et reconnait egalement la primaute du droit europeen sur le droit national.20 En fait, cela signifie que le droit de l'UE prime sur la constitution de l'Etat, ce qui vaut aussi si la constitution est contraire (seulement) a ce qu'on appelle le droit derive de l'UE et meme s'il s'agit de dispositions constitutionnelles qui garantissent les droits de l'homme.21 La prise de position sur la primaute du droit de l'UE par rapport a la Constitution peut etre acceptable pour la plupart des dispositions constitutionnelles parce que les principes fondamentaux qui definissent la relation entre le droit interne et le droit de l'UE (ce sont les principes de primaute, loyaute, applicabilite di-recte, effet direct, transfert des competences, subsidiarite et proportionnalite) 19 Toutefois, la doctrine constitutionnelle parle de l'article dit « europeen ». Voir F. Grad, op. cit., p. 197. 20 F. Grad, op. cit., p. 199. Le meme avis est emis aussi par M. Cerar qui considere les valeurs de l'article 3a /I de la Constitution comme une sorte de garantie, mais ne leur attribue pas une valeur telle qu'il serait possible de rejeter sur leur base l'application des actes individuels ou des dispositions de la legislation primaire ou derivee de l'UE qui serait contraire a la Constitution. Ä son avis, tant que l'UE sera basee sur ces valeurs, les autorites de l'Etat et les autres sujets doivent systematiquement observer l'ordre juridique de l'UE precisement a cause de l'article 3a/III; voir M. Cerar, Commentaire au premier paragraphe de l'article 3a, dans : L. Šturm (red.), op. cit. 2011, p. 78. 21 Il en decoule ainsi egalement des arrets de la Cour de justice de l'UE ; voir les arrets de la Cour dans l'affaire Costa c/ ENEL du 15 juillet 1964, 6/64, ECR 585, dans l'affaire Internationale Handelsgesellschaft du 17 decembre 1970, 11/70, ECR 1125, et dans l'affaire Tanja Kreil du 11 janvier 2000, C-285/98, ECR I-69. Voir aussi les arrets de la Cour de justice de l'UE dans les affaires Melloni c/ Ministerio Fiscal du 26 fevrier 2013, C-399/11, et Äklagaren c/ Äkerberg Fransson du 26 fevrier 2013, C-617/10. Voir aussi V. Trstenjak, M. Brkan, op. cit., pp. 209-211. sont, selon I'article 3a/III, en meme temps les principes constitutionnels.22 La question se pose toutefois de savoir si nous pouvons vraiment accepter cela in-conditionnellement lorsqu'il s'agit des droits de l'homme.23 Dans la doctrine, nous trouvons aussi des prises de position qui soulignent, en conformite avec la theorie du pluralisme constitutionnel, que la relation entre le droit de l'UE et le droit national n'est pas hierarchique, mais heterarchique, puisqu'il s'agit de deux ordres juridiques independants au meme niveau, et que le droit national n'est pas subordonne au droit europeen.24 Le rapport entre l'ordre constitutionnel et le droit de l'UE est ne comme consequence du transfert par un traite de l'exercice d'une partie des droits souverains de l'Etat a une institution speciale - l'UE. Il est tellement particu-lier qu'il faut le mettre a l'ecart du cadre general de la reglementation du rapport entre la Constitution et le droit international. En raison de sa complexite et de ses particularites, son examen aurait depasse la portee de cet expose, et nous le laisserons de cote dans l'analyse suivante. 3. LES COMPETENCES ET LES POUVOIRS DE LA CC Du point de vue comparatif, nous pouvons classer la CC parmi les cours consti-tutionnelles ayant de nombreuses competences : elle statue sur la constitution-nalite des lois, la constitutionnalite et la legalite des reglements subordonnes a la loi, les recours constitutionnels a cause des violations des droits de l'homme lors des proces judiciaires, la procedure de destitution des titulaires de fonc-tions gouvernementales superieures (chef de l'Etat, chef du Gouvernement, ministre), la constitutionnalite des referendums legislatifs et locaux, les conflits de competence entre les institutions aussi bien au niveau de l'Etat qu'entre l'Etat et les entites de l'autonomie administrative locale et sur la constitutionnalite des actes et du fonctionnement des partis politiques. En meme temps, nous pouvons la classer parmi les cours constitutionnelles auxquelles un acces generalise est assure non seulement a certaines institutions specifiques (comme par exemple, une minorite de deputes, les tribunaux, le mediateur et beaucoup 22 S. Nerad, Recepcija prava Evropske unije v nacionalno ustavno pravo: Ustavno sodišče med pravom Evropske unije in Ustavo (La reception du droit de l'Union euro-peenne dans le droit constitutionnel national: La Cour constitutionnelle entre le droit de l'Union europeenne et la Constitution), dans : I. Kaučič (red.), op. cit., p. 383. Voir aussi la Decision de la CC no U-I-146/12 du 14 novembre 2013 (JO RS no 107/13). 23 En rapport a cela, cf. J. Sovdat, op. cit., pp. 902-905 et 916-918, et F. Kirchhof, The Evolution of the Relationship between German Constitutional Law and European Union Law (L'evolution des relations entre le droit constitutionnel Allemand et le droit de l'Union europeenne), dans : J. Sovdat (red.), op. cit., pp. 131-138. 24 M. Avbelj, op. cit., pp. 758-763. d'autres), mais aussi a des personnes physiques et morales. Celles-ci peuvent, selon les conditions determinees par la loi, contester directement aussi bien les lois et les reglements subordonnes a la loi (par l'initiative) que les decisions ju-diciaires par lesquelles une decision a ete prise a leur encontre sur leurs droits, obligations ou charges (par le recours constitutionnel). Parmi les competences de la CC qui sont liees aussi aux questions de droit international, il convient de mentionner en particulier les competences de controle de la constitutionnalite des lois, de controle de la constitutionnalite et legalite des reglements subordonnes a la loi, et les recours constitutionnels (les alineas de 1 a 5 et l'alinea 6 du premier paragraphe de l'article 160 de la Constitution). La CC a la competence d'annuler les lois inconstitutionnelles ; elle peut les annuler avec effet ex nunc, aussi avec une periode d'ajournement d'un an25 alors que pour la reglements subordonnes a la loi, elle peut les annuler aussi avec effet retroactif (ex tunc - lorsqu'il faut effacer les effets nuisibles dus a l'inconstitutionnalite ou a l'illegalite).26 Ä part ces techniques de prises de decisions de la CC qui sont les seules a etre regies par la Constitution (article 161/II), la CC utilise aussi d'autres techniques etablies pour prendre des decisions, par exemple en rendant des decisions dites « declaratoires »27 ou bien les decisions « interpretatives » (interpretation sous reserve). Dans les cas ou les violations des droits de l'homme ont ete etablies, la CC annule les decisions contestees par un recours constitutionnel et renvoie l'affaire a la juridiction competente pour qu'elle se prononce a nouveau sur l'affaire,28 ou, dans des cas exceptionnels, la CC peut se limiter a la constatation d'une violation d'un droit de l'homme.29 Elle a aussi la competence, exceptionnelle pour les cours constitutionnelles, qui est de pouvoir, dans certains cas, statuer elle-meme sur l'affaire en cause apres annulation des decisions judiciaires contestees.30 Lors de l'exercice des competences citees, la CC touche necessairement aussi au droit international. D'une maniere particuliere, elle rencontre ce droit lors du controle a priori de la constitutionnalite d'un traite dans la procedure de sa ratification (autorisation de la ratification) a l'Assemblee nationale (article 160/II de la Constitution). L'objectif de l'attribution de cette competence a la CC reside precisement dans le fait qu'a cause de la primaute de la Constitution 25 Voir aussi les articles 43 et 45/III de la Loi sur la Cour constitutionnelle, JO RS nos 64/07 - texte officiel consolide et 109/12, ci-apres : la LCC. 26 Voir aussi l'article 45/II de la LCC. 27 Voir l'article 48 de la LCC. 28 Article 59/I de la LCC. 29 Voir, par exemple, la Decision no U-I-50/09, Up-260/09 du 18 mars 2010 (JO RS no 29/10 et OdlUS XIX, 2). 30 Article 60/I de la LCC. sur le droit international, elle permet d'eviter un rapport conflictuel entre les normes constitutionnelles et les traites. 4. LE RÖLE DE LA CC DANS LA RESOLUTION DES CONFLITS ENTRE LA CONSTITUTION ET LE DROIT INTERNATIONAL Dans l'introduction, nous avons indique que la CC a essentiellement, lors de l'exercice de ses competences et en ce qui concerne le droit international, deux roles differents. Tout d'abord, elle assure avec ses decisions l'effectivi-te du droit international dans l'ordre juridique interne - et cela notamment sous deux aspects differents. D'un cote, elle est competente pour controler la conformite des lois et les reglements subordonnes a la loi non seulement avec la Constitution, mais aussi avec le droit international (les principes gene-raux du droit international y compris le droit international coutumier31 et les traites ; deuxieme alinea de l'article 160/I de la Constitution). De l'autre, elle doit prendre en consideration ex officio le droit international en vigueur, pour chaque controle de la constitutionnalite des lois et autres reglements, c'est-a-dire meme si les participants dans la procedure devant la CC ne se referent pas expressement au droit international.32 Nous pouvons donc dire que, dans la procedure devant la CC, la regle iura novit curia est applicable egalement pour le droit international incorpore a l'ordre juridique interne, tout comme pour la Constitution. Quand il s'agit d'instruments internationaux qui regissent les droits de l'homme, cette regle est applicable aussi bien pour l'exercice de la competence du controle de la constitutionnalite des reglements que pour les decisions sur les recours constitutionnels. L'objectif de ces derniers est jus-tement d'assurer que les tribunaux respectent les droits de l'homme lors des procedures judiciaires, y compris ceux regis par le droit international ; la CC est la derniere juridiction de l'Etat appelee a verifier si les tribunaux ont effec-tivement accompli cette tache. Son deuxieme role fondamental concernant le droit international est de re-soudre les conflits entre ce dernier et le droit constitutionnel, ce qui est le sujet de la presente analyse detaillee. Par rapport aux competences et aux pouvoirs de la CC presentes, nous pouvons de ce point de vue parler, en realite, de trois aspects de ce role. Le premier aspect se rapporte au role que la CC joue lors du 31 C'est dans cette derniere categorie que la CC place la Declaration universelle des droits de l'homme ; voir l'Ordonnance no Up-490/03 du 22 mars 2005. 32 Le deuxieme paragraphe de l'article 22 de la LCC determine que le controle de constitutionnalite dans tous les cas comprend aussi un controle de conformite avec le droit international. controle a priori de la constitutionnalite d'un traite avant son autorisation de ratification. Il est le plus direct et entraine une resolution permanente du conflit d'une maniere ou d'une autre. Son caractere est essentiellement preventif. Le deuxieme aspect de son role apparait lorsque le traite (en vigueur aussi au sens du droit international) prend deja effet dans l'ordre juridique interne. Son incorporation dans l'ordre juridique interne a deja ete effectuee lors de l'entree en vigueur de la loi (du decret) de ratification (ou bien lors de son entree en vigueur internationale si avant l'incorporation il n'a pas encore ete en vigueur au niveau international). La CC est competente pour controler la constitutionnalite (selon le premier et le troisieme alinea de l'article 160/I de la Constitution) des deux actes de ratification (la loi et le decret). Elle a aussi le pouvoir de les annuler avec effet immediat (ex nunc), ou de les annuler avec periode d>ajournement, ou bien, pour un decret, de l'annuler meme avec effet retroactif (ex tunc). Ä travers le controle de la constitutionnalite de ses actes internes la CC peut aussi controler la constitutionnalite d'un traite.33 Elle se trouve ici dans le role de l'institution qui resout un rapport conflictuel entre le droit constitu-tionnel et le droit international en protegeant la primaute de la Constitution. Enfin, le troisieme aspect de son role apparait lorsqu'il s'agit des droits de l'homme, car en interpretant les dispositions de la Constitution et des traites, la CC decide si c'est la norme constitutionnelle ou la norme d'un instrument international regissant un droit de l'homme qui prevaut. La CC est obligee de respecter cela quand elle exerce le controle de la constitutionnalite des reglements et aussi quand elle decide en tant que la derniere juridiction de l'Etat dans des cas individuels. Ce conflit entre le droit constitutionnel et le droit international est toujours resolu en conformite avec le principe de la protection maximale du droit de l'homme en question, qui est etabli par la Constitution elle-meme (article 15/V). 4. 1. Le controle a priori de la constitutionnalite d'un traite Lors de la procedure (de l'autorisation) de ratification d'un traite, la CC donne un avis contraignant sur sa constitutionnalite. Ceci est possible aux termes du deuxieme paragraphe de l'article 160 de la Constitution sur proposition des requerants autorises (le President de la Republique, le Gouvernement ou un tiers des deputes). L'objectif de ce controle a priori de constitutionnalite est clairement preventif : eviter qu'a l'entree en vigueur du traite, des normes internationales inconstitutionnelles directement applicables (self-executing) entrent dans le droit interieur ou que le traite (non self-executing) oblige l'Etat 33 La CC a statue ainsi deja dans la Decision no U-I-147/94 du 30 novembre 1995 (JO RS no 3/96 et OdlUS IV, 118), et aussi dans l'Avis no Rm-1/97. a adopter des actes juridiques internes qui seraient non conformes a la Constitution.34 Le fait que seuls les requerants autorises peuvent demander le controle d'un traite, tout comme le fait qu'ils ne peuvent le demander que lorsque le traite est en procedure (de l'autorisation) de ratification a l'Assemblee nationale, sont les deux exigences procedurales qui doivent etre remplies pour que l'avis soit donne. Ainsi, la responsabilite des requerants autorises est renforcee quand, ayant des doutes sur la constitutionnalite d'un traite, ils saisissent la CC pour le controler. La CC a souligne que c'est l'Assemblee nationale qui est respon-sable des obligations internationales inconstitutionnelles adoptees si aucun requerant autorise ne demande le controle de la constitutionnalite du traite. Par contre, si le controle est demande, c'est la CC qui devient responsable,35 dans le cadre bien sur du controle constitutionnel requis et effectue. En plus de ce qui precede, l'exigence procedurale touchant le contenu meme de la demande presentee par le requerant doit etre remplie. Elle doit determiner expressement pour quelles dispositions du traite le controle de la consti-tutionnalite est demande, et aussi par quelles dispositions constitutionnelles la CC devrait effectuer le controle. En outre, le requerant doit indiquer les rai-sons de l'inconstitutionnalite alleguee ou au moins presenter ses doutes quant a la constitutionnalite du traite, et ceci meme s'il pense que le traite n'est pas inconstitutionnel mais qu'il veut obtenir le controle de sa constitutionnalite precisement pour que les doutes soient refutes.36 Si les exigences procedurales pour que la CC se prononce ne sont pas remplies, celle-ci rejette la demande.37 La LCC ne regle pas dans le detail comment l'avis sur la constitutionnalite d'un traite est donne ; pour cela, en vertu de l'article 49/I de la LCC, sont appliquees mutatis mutandis les dispositions de la LCC qui regissent la procedure du controle de la constitutionnalite des lois et des autres reglements. Si elle decide sur le fond de l'affaire, elle n'adopte pas une decision, mais un avis. Jusqu'a present, la CC a adopte cinq avis sur la constitutionnalite de traites. Des le premier, en controlant la constitutionnalite de l'Accord d'associa-tion entre la Slovenie d'un cote et la Communaute europeenne et les Etats membres de l'autre, elle a etabli les principes fondamentaux de ce genre de controle constitutionnel. Elle a souligne que l'Assemblee nationale ne devait 34 Voir l'Avis no Rm-1/97. 35 Ibidem. 36 Le contenu de la demande est determinee, en conformite avec l'article 24b de la LCC, dans l'annexe au Reglement interieur de la CC (JO RS nos 86/07 et autres). Voir aussi l'Avis no Rm-1/09 du 18 mars 2010 (JO RS no 25/10 et OdlUS XIX, 12). 37 Voir, par exemple, l'Ordonnance no Rm-1/01 du 14 juin 2001 (OdlUS X, 120). pas autoriser la ratification d'un traite par lequel I'Etat s'engagerait a modifier la Constitution. L'avis adopte par la CC n'est pas un avis consultatif, mais bien une decision contraignante qui est, quant a sa valeur contraignante et par ses effets juridiques, mis sur un pied d'egalite avec les decisions.38 Il se distingue de ces dernieres par le fait que par un avis, la CC ne peut annuler les dispositions du traite comme elle peut le faire pour les actes juridiques internes.39 Ceci est tout a fait logique, puisque la CC fonctionne en tant qu'autorite interne de l'Etat, alors que le traite est un acte de droit international. La CC decide si le traite est ou n'est pas conforme a la Constitution. Si la CC adopte l'avis qu'il est conforme, sa ratification (l'autorisation de la ratification) est laissee a l'appreciation politique de l'Assemblee nationale.40 Si, par contre, la CC adopte un avis negatif, c'est-a-dire l'avis que certaines dispositions du traite sont non conformes a la Constitution, le legislateur ne peut alors autoriser la ratification du traite que s'il modifie d'abord la Constitution ; sauf si une reserve appropriee au traite est admise, laquelle doit dans ce cas obligatoire-ment etre exprimee.41 Jusqu'a present, la CC a constate l'inconstitutionnalite de dispositions individuelles d'un traite uniquement dans son premier avis sur l'Accord d'associa-tion a l'UE. Les dispositions de cet accord qui permettaient aux citoyens des Etats membres des Communautes europeennes (a l'epoque) et aux filiales des societes l'achat de biens immeubles etaient notamment non conforme avec l'article 68 de la Constitution, qui permettait aux etrangers d'obtenir des biens immobiliers uniquement par voie de succession et sous reserve de reciprocite. Pour cela, avant d'autoriser la ratification de l'Accord d'association, l'Assemblee nationale a modifie la disposition de la Constitution citee. Dans les autres cas, la CC n'a pas constate d'inconstitutionnalite.42 38 Voir l'Avis no Rm-1/97. 39 Ibidem. 40 Ibidem. 41 Ibidem. 42 Dans la majorite de cas, il s'agissait des avis sur la constitutionnalite des traites conclus avec la Croatie, l'Etat voisin. Par l'Avis no Rm-1/00 du 19 Avril 2001 (JO RS no 43/01 et OdlUS X, 78), la CC s'est prononcee sur la constitutionnalite des dispositions individuelles de l'accord relatif au trafic frontalier et a la cooperation avec cet Etat ; par l'Avis no Rm-2/02 du 5 decembre 2002 (JO RS no 117/02 et OdlUS XI, 246), la CC s'est prononcee sur la constitutionnalite des dispositions individuelles du contrat relatif a la regulation des relations portant sur le statut et autres rapports juridiques lies aux inves-tissements dans la Centrale nucleaire de Krško, a son exploitation et a son demantelement ; alors que l'Avis no Rm-1/09 touchait a l'accord d'arbitrage entre les gouvernements des deux Etats par lequel un mecanisme a ete convenu pour resoudre le litige frontalier entre les deux pays. Outre les techniques fondamentales de prise de decision judiciaire consti-tutionnelle (constatation de la conformite/non-conformite d'un traite a la Constitution), la CC a, jusqu'a present, plusieurs fois utilise la technique de l'avis « interpretatif ». Celui-ci est adopte lorsque le texte du traite peut etre interprete d'au moins deux fa^ons differentes dont l'une est conforme a la Constitution et l'autre ne l'est pas (ce qui decoule clairement du raisonnement de l'avis). Par son avis, la CC elimine de l'ordre juridique interne l'interpreta-tion non constitutionnelle du traite. La CC s'est deja servie de cette technique, qui est egalement une technique constante de la prise de decisions constitu-tionnelles lors du controle des lois, dans l'Avis n° Rm-1/97 relatif aux deux dispositions du traite, ainsi que dans l'Avis n° Rm-1/0243, par lequel elle s'est pro-noncee sur la constitutionnalite de dispositions particulieres de l'accord passe entre la Republique de Slovenie et le Saint-Siege sur des questions de droit. Comme chaque avis, un avis « interpretatif » produit les effets uniquement en droit interne, mais evidemment, il ne peut pas avoir d'effets au niveau du droit international. La CC l'a expressement souligne : l'avis est contraignant pour toutes les autorites de la Republique de Slovenie. Cela signifie entre autre que pour l'autorisation de la ratification d'un traite, non seulement l'Assemblee nationale, mais aussi les autres autorites de l'Etat doivent, soit lors de l'exercice de l'accord, soit lors de la conclusion d'accords ulterieurs avec le Saint-Siege, tenir compte de l'interpretation (conforme a la Constitution) de l'accord qui decoule de l'Avis de la CC. De cette maniere, la CC joue un role primordial dans la procedure du controle a priori de la constitutionnalite des traites, lequel empeche qu'un conflit ne surgisse entre les normes constitutionnelles et les traites. Assurement, il est preferable de prevenir les conflits que de les guerir. 4. 2. Le controle indirect de la constitutionnalite d'un traite Ainsi, par la voie de l'incorporation et apres la publication du traite au journal officiel de l'Etat, les traites deviennent partie integrante de l'ordre juridique national et s'appliquent directement, conformement a l'article 8 de la Constitution (naturellement, s'ils sont egalement en vigueur au niveau international). Leur applicabilite directe est possible en pratique si la nature de leurs dispositions le permet (donc, s'il s'agit de dispositions dites directement applicables - self-executing). Il faut alors constater pour chaque cas individuel s'il s'agit de telles dispositions ; cela est une des taches des tribunaux nationaux.44 43 Avis du 19 novembre 2003 (JO RS no 118/03 et OdlUS XII, 89). 44 La CC a statue ainsi dans la Decision no U-I-312/00 du 23 avril 2003 (JO RS no 42/03 et OdlUS XII, 39). Cela vaut egalement pour la CC lorsqu'elle exerce ses competences. Aux termes de I'article 125 de la Constitution, les juges des tribunaux sont lies par la Constitution et par la loi. Le fait qu'ils soient lies par la Constitution implique qu'ils sont aussi lies par les traites. Lorsqu'ils interpretent le droit, ils doivent tenir compte du positionnement hierarchique des traites qui est superieur a celui des lois. Dans le cas ou les discordances entre le traite et la loi ne peuvent etre resolues par les methodes etablies d'interpretation de la loi, ils doivent suspendre la procedure et demander a la CC de controler la conformi-te de la loi avec le traite, comme cela est prevu dans l'article 156 de la Constitution. Les tribunaux doivent aussi proceder ainsi lorsqu'ils sont d'avis que le traite qu'ils doivent appliquer lors d'un proces est non conforme a la Constitution ; dans ce cas, ils doivent saisir la CC pour statuer sur la constitutionalite de la loi de ratification. Il en est ainsi justement parce que la Constitution ne reconnait pas la primaute du droit international sur l'ordre constitutionnel. La CC peut controler la constitutionnalite du traite aussi a travers la loi de ratification (ou a travers le decret de ratification).45 Si les traites ne sont pas directement applicables, ils deviennent malgre tout, sur la base de la loi de ratification, partie integrante du droit interieur et s'appliquent de la meme maniere que les autres sources de droit qui neces-sitent des reglements pour etre applicables dans des cas individuels.46 Ceux-ci doivent entrer en vigueur lorsque le traite entre en vigueur au niveau international afin que les obligations fixees par le traite puissent etre accomplies. Par consequent, aussi dans ce cas, une obligation internationale qui s'oppose a la Constitution peut exister, ce qui requiert en principe le meme procede que lorsqu'il s'agit de traites directement applicables. La CC est competente pour controler la loi (ou le decret) de ratification deja avant que le traite n'entre en vigueur au niveau international.47 Si la CC consta-tait une inconstitutionnalite du traite, elle pourrait annuler la loi (ou le decret) de ratification.48 L'annulation n'aurait certainement des effets qu'en droit in- 45 Cela decoule deja de la Decision no U-I-147/94. Si cet acte (une loi ou un decret) n'existe pas, le traite ne peut pas devenir partie integrante de l'ordre juridique interne et, dans un tel cas, la CC n'est pas competente pour le controler. Ainsi, dans l'Ordonnance no U-I-128/98 du 23 septembre 1998 (OdlUS VII, 173), lorsque l'objet de controle devant la CC etait un traite conclu entre les ministeres de la defense des deux Etats, la CC ne s'est pas estimee competente pour le controler, parce que ledit traite n'avait ete ratifie ni par une loi ni par un decret. 46 Voir aussi l'Ordonnance de la CC no U-I-128/98. 47 Comme indique par la CC dans l'Ordonnance no U-I-197/97 du 21 mai 1998 (OdlUS VII, 93). 48 L'annulation de la loi de ratification avant que le traite entre en vigueur au niveau international aurait empeche son incorporation dans l'ordre juridique interne. terne,49 alors qu'au niveau international, cela signifierait une violation du traite qui serait evaluee selon le droit international.50 Jusqu'a present, la CC a controle deux traites a travers l'acte de ratification,51 mais elle n'a pas constate qu'ils etaient inconstitutionnels. Toutefois, la possibilite d'une telle decision existe. L'annulation des effets du traite en droit interne par l'annulation d'acte de ratification est un outil puissant de la CC au regard des consequences qu'elle entraine apres que l'obligation a deja ete acceptee au niveau international. L'annulation immediate d'acte de ratification pourrait ebranler la credibilite de l'Etat dans la communaute internationale. Pour cette raison, la CC doit s'en servir de fa^on extremement restrictive. Concernant ce point, la marge de manffiuvre est probablement plus large dans le cas de l'annulation avec periode d'ajournement. La CC adopte une telle decision lorsqu'elle constate que l'annulation immediate provoquerait des consequences inconstitution-nelles encore plus nuisibles que si la loi inconstitutionnelle restait encore en vigueur pendant une certaine periode (un an au maximum). Pendant la periode d'ajournement, les autorites competentes ont ainsi assez de temps pour resoudre le conflit entre la Constitution et le traite - soit dans le sens de la revision de la disposition constitutionnelle, soit dans le sens de la denonciation du traite faite en conformite avec le droit international. Dans ce contexte, il existe naturellement aussi une autre possibilite, a savoir l'interpretation har-monieuse de la Constitution avec le traite - si cela est possible - de fa^on a ce que le traite ne soit pas considere comme inconstitutionnel. 4. 3. La resolution du conflit par la decision qui fixe la prevalence soit de la norme constitutionnelle, soit de la norme internationale En exer^ant ses competences, la CC doit toujours respecter le principe de la protection maximale des droits de l'homme. Elle doit appliquer les traites di-rectement s'ils reglent un droit de l'homme que la Constitution ne regle pas. 49 La CC l'a indique ainsi deja dans l'Avis no Rm-1/97. 50 Dans l'Avis no Rm-1/97, la CC s'est referee au principe du droit international pacta sunt servanda et aux dispositions de la Convention de Vienne sur le droit des traites qui requierent l'accomplissement des traites in bona fide. 51 Dans le premier cas, par la Decision no U-I-147/94, la CC a controle l'accord relatif aux pensions des retraites militaires passe avec l'Etat voisin la Croatie, et dans le deu-xieme cas, par la Decision no U-I-180/10 du 7 octobre 2010 (JO RS no 6/11), l'accord d'arbi-trage, egalement avec la Croatie, relatif a la mise en place du mecanisme pour la resolution du litige frontalier entre les deux Etats. Cet accord a d'abord fait objet de controle a priori de la constitutionalite du traite, puis de controle a travers la loi de ratification a partir de la demande formulee par un tiers de deputes de l'opposition. Elle est aussi obligee d'assurer la prevalence des traites quand ils garantissent la protection d'un droit de l'homme particulier au niveau plus eleve que la Constitution. Comme il a ete deja souligne, les tribunaux eux aussi doivent assurer la primaute du droit international sur les lois et sous certaines conditions, aussi la primaute du droit international regissant les droits de l'homme sur les dispositions constitutionnelles. S'il existe une disposition de loi qui empeche le tribunal d'employer le principe de la protection maximale des droits de l'homme aux termes de l'article 15/V de la Constitution (aux termes de l'article 125 de la Constitution, le tribunal est lie par la loi), le tribunal doit, sur la base de l'article 156 de la Constitution, saisir la CC. Toutefois, le non-respect des droits de l'homme lors d'un proces peut surgir non pas a cause d>une entrave directe dans la loi elle-meme, mais aussi parce que, par la voie de l'interpretation, le tribunal a attribue a une disposition de la loi un contenu qu'il ne devrait pas lui attribuer si les exigences constitutionnelles etaient respectees (aussi les exigences des articles 15/V et 8 de la Constitution qui requierent l'applicabilite directe du traite regissant un droit de l'homme particulier). Le cas echeant, la CC traite ces questions dans les procedures des recours constitutionnels (sixieme alinea de l'article 160/I de la Constitution).52 Lorsque les requerants se referent tant aux dispositions de la Constitution qu'aux dispositions des traites, le plus souvent aux dispositions de la Convention (europeenne) de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertes fondamentales (ci-apres : la Convention), la CC determine d'abord si les deux, la Constitution ainsi que le traite, regissent le droit de l'homme concerne ; le cas echeant, la CC apprecie lesquelles des dispositions invoquees garantissent une protection du droit de l'homme en question au niveau plus eleve. Si la CC note qu'un droit de l'homme est regle par le traite, mais que la Constitution ne le comporte pas, elle applique directement les dispositions du traite. Si la CC constate que le niveau de protection est egal (ce qu'elle indique expressement dans les motifs), elle apprecie les violations alleguees selon les dispositions de la Constitution. Dans ce cas-la, la primaute du droit constitutionnel sur le droit international se manifeste, en depit de l'exigence constitutionnelle de l'applicabilite directe des traites. Ainsi, la CC a deja apprecie que les dispositions des articles 6, 18 et 13 de la Convention et les articles 14 et 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques n'assurent pas le droit a la protection judiciaire dans une plus large mesure que l'article 23 de la Consti- 52 La CC decide sur les recours constitutionnels apres epuisement de toutes les voies de recours judiciaires, de fa^on qu'elle decide sur les recours constitutionnels a l'encontre des decisions de la Cour supreme de la Republique de Slovenie lorsque les voies de recours extraordinaires sont admises devant cette Cour, et sinon a l'encontre de decisions des cours d'appel. Voir les articles 50 a 53 de la LCC. tution ; par consequent, l'appreciation des violations alleguees du point de vue de la Constitution est suffisante.53 Elle a agi de la meme maniere lorsque le requerant s'est refere a l'article 5 de la Convention a propos duquel elle a constate que les garanties par rapport a l'exigence de l'examen judiciaire de la privation de liberte sans delai excessif de l'article 5/III de la Convention etaient les memes que celles de l'article 20 de la Constitution ; pour cette rai-son, elle n'a apprecie la violation alleguee de ces garanties que du point de vue de la Constitution.54 Si la Constitution assume un niveau plus eleve d'un droit de l'homme que le traite, la CC applique la Constitution. Dans la Decision n° Up-1116/0955, elle a constate, contrairement a la Cour administrative de la Republique de Slovenie, que les normes procedurales pour l'appreciation de l'admissibilite des interferences avec le droit a la liberte personnelle inscrites dans la Convention et dans l'article 19 de la Constitution n'etaient pas comparables. Elle a souligne que la Constitution determine des criteres plus stricts pour limiter le droit a la liberte personnelle. Sur cette base, elle a decide qu'il fallait assurer les droits garan-tis par l'ordre constitutionnel national (comme prevu par l'article 15/V de la Constitution et aussi par l'article 53 de la Convention qui dispose pareillement) a l'etranger dont les mouvements etaient limites a tel point que cela representait une limitation du droit a la liberte personnelle (par une decision du Ministere de l'Interieur et sur la base de la loi sur la protection internationale). De ce point de vue, il convient encore de mentionner certaines autres decisions de la CC. Dans l'Ordonnance n° Up-1378/06,56 la CC a indique que la Convention ne soulignait que le droit de l'accuse d'utiliser sa langue dans la procedure penale (articles 5/II et 6/III de la Convention), alors qu'elle ne conferait pas un tel droit aux parties dans d'autres procedures judiciaires. Pour cette raison, la CC a examine les griefs du requerant du point de vue de l'article 62 de la Constitution qui donne a chacun le droit, dans la realisation de ses droits et devoirs et lors des procedures devant les autorites de l'Etat et les autres autorites remplissant une fonction publique, d'utiliser sa langue et son ecriture selon les modalites fixees par la loi. Le cadre constitutionnel de ce droit provient des normes constitutionnelles relatives au proces equitable qui donnent la possibilite a celui qui ne comprend pas la langue du tribunal de suivre la procedure dans la langue qu'il comprend. 53 La CC l'a indique ainsi deja dans la Decision no Up-3/97 du 15 juillet 1999 (OdlUS VIII, 291). 54 Decision no Up-402/12, U-I-86/12 du 5 juillet 2012 (JO RS no 55/12). 55 Decision du 3 mars 2011 (JO RS no 22/11). 56 Ordonnance du 20 mai 2008 (JO RS no 59/08 OdlUS XVII, 41). Concernant les points mentionnes, parfois, les prises de position de la CC evo-luent. Au debut, dans le cas du droit de l'accuse d'interroger ou de demander l'interrogation des temoins a charge, la CC s'est appuyee sur la disposition de la Convention,57 parce qu'elle etait d'avis que la Constitution ne regissait pas ce droit. Plus tard, s'appuyant sur la Convention et sur la jurisprudence de la Cour europeenne des droits de l'homme (ci-apres la CEDH), la CC a egalement interprete la disposition de l'article 29 de la Constitution relative au droit de l'accuse a la defense dans la procedure penale de maniere a ce qu'elle contienne aussi le droit mentionne.58 Ensuite, dans la Decision no Up-1293/10,59 elle a expressement indique que le droit d'interroger les temoins a charge est assure par le point d) de l'article 6/III de la Convention et par l'ar-ticle 29 de la Constitution. Ainsi, il est maintenant indubitable que l'article cite de la Constitution assure egalement le droit d'interroger les temoins a charge dans la procedure penale, bien qu'il ne le mentionne pas expressement. Eu egard a ce qui precede, il est egalement evident qu'a l'aide du contenu ex-pressement inclus dans les dispositions des traites portant sur les droits de l'homme, la CC complete, par la voie de l'interpretation, le contenu des dispositions de la Constitution plus generales portant sur les droits de l'homme. Sur ce fondement, elle exerce ensuite l'appreciation des violations des droits de l'homme alleguees du point de vue de la Constitution et non du point de vue des traites directement applicables. Une situation particuliere apparait dans ce contexte lorsqu'il s'agit de l'appli-cation de la Convention. Ce traite se distingue notamment des autres traites par le fait qu'il etablit une institution particuliere et un mecanisme destine a assurer le respect des dispositions de la Convention. Dans les cas ou la CC n'est pas l'ultime autorite quant a l'interpretation des dispositions du traite portant sur les droits de l'homme, puisque le dernier mot est alors confie a la CEDH en tant que tribunal special international, surgissent inevitablement des rapports particuliers entre les deux cours qui necessitent le respect mutuel 57 Dans la Decision no Up-207/99 du 4 juillet 2002 (JO RS no 65/02 et OdlUS XI, 266) elle a indique que le droit de l'accuse d'interroger les temoins a charge n'est pas expres-sement mentionne dans la Constitution, par consequent il faut appliquer directement le point d) de l'article 6/III de la Convention sur la base de l'article 8 de la Constitution. La CC a statue de la meme fa^on aussi dans la Decision no Up-518/03 du 19 janvier 2006 (JO RS no 11/06 et OdlUS XV, 37). 58 Dans la Decision no Up-719/03 du 9 mars 2006 (JO RS no 30/06 et OdlUS XV, 41), la CC a deja inclus ledit droit a la violation du droit a la defense inscrit dans l'article 29 de la Constitution et indique que la violation dudit droit de la Convention implique egalement une violation du droit a la defense. La CC a decide de meme aussi dans la Decision no Up-754/04 du 14 septembre 2006. 59 Decision du 21 juin 2012 (JO RS no 52/12). de leur jurisprudence. La CC est attentive a ce point. Pour cela, elle n'adopte pratiquement aucune decision importante sans se referer a des arguments decoulant des jugements de la CEDH. Ces derniers trouvent leur place dans les decisions de la CC par deux voies differentes. En premier lieu, la CC complete, par la voie de l'interpretation, les dispositions de la Constitution a l'aide du contenu attribue par la CEDH aux dispositions particulieres de la Convention.60 En deuxieme lieu, la CC utilise souvent les arguments par lesquels la CEDH justifie ses decisions comme des arguments supplementaires pour renforcer ses prises de positions.61 Ce faisant, la CC se considere comme liee a la jurisprudence de la CEDH, independamment du fait que le jugement en question ait ete adopte dans une affaire ou la Slove-nie etait impliquee dans la procedure ou non.62 Cela est egalement un moyen particulier par lequel il est possible d'eviter les conflits entre le droit constitu-tionnel et le droit international et qui empeche aussi la condamnation de l'Etat devant la CEDH sur la base du droit international pour violation des droits de l'homme (la Convention). 5. CONCLUSION En Slovenie, la primaute de la Constitution sur le droit international est etablie. Dans la hierarchie des actes juridiques, ce dernier est pourtant superieur aux lois (et aux reglements subordonnes a la loi). Il existe trois types d'exceptions au principe de la primaute de la Constitution. Les principes generaux du droit international peuvent etre reconnus comme des principes constitutionnels. 60 Dans sa Decision no U-I-425/06 du 2 juillet 2009 (JO RS no 55/09 et OdlUS XVIII, 29) elle a controle la constitutionnalite des regles concernant l'enregistrement de parte-nariat d'un couple homosexuel. La CC a indique que l'orientation sexuelle, bien qu'elle n'y soit pas expressement citee, est sans aucun doute une des situations emises dans l'article 14/I de la Constitution qui interdit la discrimination. Elle a soutenu son point de vue aussi par le fait que meme la CEDH considere l'orientation sexuelle comme une circonstance sur la base de laquelle il est interdit de discriminer, bien qu'elle ne figure pas parmi les circonstances expressement citees dans l'article 14 de la Convention. 61 En examinant si l'assignation a domicile represente une limitation de la liberte de mouvement ou une limitation du droit a la liberte personnelle, la CC a constate que ni la Constitution ni la Convention ne contiennent des dispositions particulieres a ce sujet. Dans la Decision no Up-286/01 du 11 decembre 2003 (JO RS no 2/04 et OdlUS XII, 114) la CC a decide que par son intensite et son mode d'execution il s'agit d'une limitation telle des droits de l'homme qu'elle represente une limitation de la liberte personnelle. Afin d'affirmer une telle prise de position, elle s'est referee aux jugements de la CEDH par lesquels cette derniere s'est prononcee sur la delimitation entre la limitation de la liberte personnelle et celle de la liberte de mouvement. 62 Decision no U-I-65/05 du 22 septembre 2005 (JO RS no 92/05 et OdlUS XIV, 72). Les traites regissant les droits de l'homme relevent du niveau constitution-nel, de sorte que leurs dispositions peuvent prevaloir sur les dispositions de la Constitution si elles assurent soit un droit de l'homme que la Constitution n'assure pas, soit un niveau plus eleve de protection du droit de l'homme en question que celui de la Constitution. Une place particuliere est aussi occupee par le droit de l'UE, mais une analyse plus approfondie de ce sujet n'est pas l'objet de cet expose. L'examen des competences et des pouvoirs de la CC, ainsi que de la jurisprudence constitutionnelle existante montre que la CC joue un role plutot actif dans la resolution des conflits entre la Constitution et le droit international. Ce role est tres direct et preventif lorsqu'il s'agit du controle a priori de la constitutionnalite d'un traite. Toutefois, les possibilites d'interventions de la CC dans ce domaine ne sont pas encore epuisees. La CC peut egalement in-directement controler la constitutionnalite d'un traite qui est deja en vigueur tant au niveau international qu'en droit interne a travers le controle de l'acte de ratification. En annulant l'acte de ratification sur la base de laquelle l'incor-poration du traite dans l'ordre juridique interne a ete realisee, la CC assure la primaute de la Constitution sur le droit international. Cependant, elle risque ainsi de provoquer que l'Etat viole les obligations internationales adoptees, ce qui n'est pas vraiment une maniere souhaitable de resoudre les conflits entre la Constitution et le droit international. Finalement, la CC joue un role particulier dans le domaine de la protection des droits de l'homme par l'interpretation des dispositions de la Constitution et des traites portant sur les droits de l'homme ou, dans l'interet d'assurer la protection la plus elevee possible d'un droit de l'homme, elle decide de la prevalence soit de la norme constitutionnelle, soit de la norme du droit international. Bibliographie Matej Avbelj, Supremacy or Primacy of EU Law - (Why) Does it Matter? (La suprematie ou la primaute du droit de l'UE - (Pourquoi) Est-ce que c'est important ?), European Law Journal, 17/2011, pp. 818-836. 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Izvirni znanstveni članek UDK: 342.565.2:341.24 VLOGA USTAVNEGA SODIŠČA PRI RAZREŠEVANJU NASPROTIJ MED USTAVO IN MEDNARODNIM PRAVOM Jadranka Sovdat, univerzitetna diplomirana pravnica, doktorica pravnih znanosti, predsednica Ustavnega sodišča Republike Slovenije Države različno urejajo razmerje med ustavnim redom in mednarodnim pravom. Temeljna načela tega razmerja pogosto urejajo že same ustave. Če ustavni red ne priznava primata mednarodnega prava in se med njima pojavijo nasprotja, se postavi vprašanje, kako se ta nasprotja razrešujejo in katera institucija ima pri tem odločilno vlogo. Članek obravnava ta vprašanja z vidika slovenske ureditve. V Sloveniji so v hierarhiji pravnih aktov mednarodni instrumenti nad zakoni. Niso pa nad ustavo, ker ta ne sprejema primata mednarodnega prava. Vendar to ne velja za vse vire mednarodnega prava. Splošna načela mednarodnega prava imajo ustavno raven, saj gre za načela, na katerih temelji suverena in demokratična pravna država, ki je hkrati enakovredna članica mednarodne skupnosti. Enako raven imajo mednarodne pogodbe, ki urejajo človekove pravice in temeljne svoboščine (v nadaljevanju: človekove pravice), čeprav tega Ustava RS ne določa izrecno. Tak položaj imajo zato, ker Ustava vsebuje načelo največjega varstva človekove pravice (peti odstavek 15. člena), ki pomeni, da glede na raven tega varstva v posameznem primeru prevlada bodisi norma ustavnega prava bodisi norma mednarodnega prava. Torej tudi človekove pravice, urejene z mednarodnimi pogodbami, uživajo ustavno zaščito. Mednarodne pogodbe postanejo del notranjega pravnega reda z uveljavitvijo ratifikacijskega zakona. Čeprav je njihovo besedilo sestavni del tega zakona, ohranijo svojo naravo mednarodnega akta. To velja tudi za mednarodne pogodbe, ratificirane z uredbo vlade. Kot izhaja iz odločitve Ustavnega sodišča RS, se zanje ne zahteva skladnost z zakonom, čeprav morajo biti splošno izvršilni predpisi skladni z zakonom (tretji odstavek 153. člena Ustave). Zato Ustavno sodišče ni pristojno za oceno zakonitosti mednarodnih pogodb, ra- tificiranih z vladno uredbo. Medsebojno neskladnost take uredbe in zakona bi lahko presojalo le, če bi med njima obstajala antinomija, ki bi pomenila neskladje z načeli pravne države (2. člen Ustave). Po mnenju ustavne sodnice in nekdanje podpredsednice Ustavnega sodišča profesorice Škrkove so tako mednarodne pogodbe, ratificirane z vladno uredbo, izenačene z zakoni. Ker se v skladu z zakonodajo sklepajo predvsem za izvrševanje mednarodnih pogodb, ratificiranih z zakoni, v tem pogledu najbrž ni mogoče pričakovati večjih nasprotij. Slovenija je članica Evropske unije, ki je nastala z mednarodnimi pogodbami, s katerimi so države pogodbenice nanjo prenesle izvrševanje nekaterih svojih suverenih pravic. Glede na uveljavljena načela delovanja Evropske unije, ki temelji na navedenih pogodbah, in tretji odstavek 3.a člena Ustave se nakazuje primat prava Evropske unije nad Ustavo. Vendar je vprašanje, ali lahko to velja tudi za tiste ustavne določbe, ki urejajo človekove pravice. Ker gre za specifične mednarodne pogodbe, jih prispevek ne obravnava podrobneje. Ustavno sodišče med drugim nadzoruje ustavnost zakonov ter ustavnost in zakonitost izvršilnih predpisov, predpisov lokalnih skupnosti in splošnih aktov, izdanih za izvrševanje javnih pooblastil. Nadzoruje tudi, ali sodišča pri sojenju spoštujejo človekove pravice. V izvrševanju teh vlog je varuh Ustave. Vendar ima pri tem tudi pomembne zadolžitve v zvezi z mednarodnim pravom. Na eni strani zagotavlja učinkovitost mednarodnega prava v Sloveniji, na drugi strani varuje Ustavo z razreševanjem nasprotij med ustavnimi normami in normami mednarodnega prava. Ustavno sodišče je pristojno presojati ne le skladnost zakonov in drugih predpisov z Ustavo, temveč tudi njihovo skladnost z mednarodnimi pogodbami. Mednarodno pravo, ki zavezuje Slovenijo, mora upoštevati po uradni dolžnosti. Z izvrševanjem svojih pristojnosti tako zagotavlja učinkovitost mednarodnega prava v državi. Pri reševanju nasprotij med ustavnim in mednarodnim pravom pa Ustavo varuje s treh vidikov: 1. z a priori oceno ustavnosti mednarodne pogodbe, 2. s posredno kontrolo ustavnosti mednarodne pogodbe in 3. z zagotavljanjem prevlade mednarodnega prava nad ustavnim pravom, da se zagotovi spoštovanje največjega varstva človekovih pravic. Vloga razreševanja nasprotij med ustavnim in mednarodnim pravom je najbolj neposredna pri predhodni oceni ustavnosti mednarodne pogodbe. Ustavno sodišče daje na zahtevo pooblaščenih predlagateljev v postopku (odobritve) ratifikacije mednarodne pogodbe mnenje o njeni ustavnosti. Namen te kontrole je očitno preventiva: da bi se preprečila uveljavitev protiustavnih določb mednarodne pogodbe, bodisi njenih neposredno uporabljivih določb bodisi obveznosti, ki jih mora država izpolniti s sprejemom notranjepravnih norm. V dosedanjih takih mnenjih je Ustavno sodišče poudarilo, da Državni zbor ne sme dovoliti ratifikacije mednarodne pogodbe, s katero bi se država obvezala spremeniti Ustavo. Mnenje, ki ga da Ustavno sodišče, ni posvetovalno, temveč ima naravo pravno obvezujoče odločitve, kakršno imajo njegove odločbe. Od njih se razlikuje po tem, da Ustavno sodišče norm mednarodne pogodbe ne more razveljaviti. To je logično, saj gre za norme mednarodnega prava, Ustavno sodišče pa je institucija notranjega prava. Če Ustavno sodišče sprejme negativno mnenje, torej da so določbe mednarodne pogodbe v neskladju z Ustavo, zakonodajalec ne sme odobriti ratifikacije mednarodne pogodbe, če poprej ne spremeni Ustave; razen, če mednarodna pogodba dopušča ustrezni pridržek, ki ga je treba v tem primeru obvezno sprejeti. Doslej je Ustavno sodišče le v enem primeru ugotovilo neskladje med Ustavo in mednarodno pogodbo, v drugih primerih pa bodisi ni ugotovilo neskladja bodisi je izdalo t. i. interpretativno odločbo. Vendar je jasno, da ta obvezuje notranjepravno, na mednarodnopravno raven pa njeni učinki ne sežejo. Pri posredni oceni ustavnosti mednarodne pogodbe je Ustavno sodišče v popolnoma drugačnem položaju. Pristojno je ocenjevati ustavnost zakona o ratifikaciji, s katerega uveljavitvijo je bila mednarodna pogodba inkorporirana v mednarodno pravo. Prek tega ocenjuje tudi ustavnost mednarodne pogodbe. Doslej Ustavno sodišče še ni razveljavilo zakona o ratifikaciji. Njegova razveljavitev bi imela le notranjepravni učinek, na ravni mednarodnega prava bi pomenila kršitev mednarodne pogodbe. To bi lahko zamajalo verodostojnost države v mednarodni skupnosti. Zato je morda izhod v razlagi Ustave, prijazni mednarodni pogodbi, če je ta mogoča. Ko gre za mednarodne pogodbe, ki urejajo človekove pravice, je Ustavno sodišče zadolženo za razreševanje nasprotij med njimi in Ustavo na način, ki zagotavlja največje varstvo posamezne človekove pravice. Od tega je odvisno, katera norma prevlada. Če mednarodna pogodba ureja človekovo pravico, ki je Ustava ne ureja, ali zagotavlja višjo raven varstva od Ustave, prevlada mednarodna pogodba. Če je raven varstva enaka ali če Ustava zagotavlja višjo raven varstva, prevlada Ustava. Poseben položaj nastopi v primeru Evropske konvencije o človekovih pravicah, ki vzpostavlja mednarodno sodišče. To ima zadnjo besedo pri razlagi te mednarodne pogodbe. Ustavno sodišče se šteje vezanega s sodno prakso Evropskega sodišča za človekove pravice ne glede na to, ali se sodba tega sodišča nanaša na Slovenijo. Na te sodbe se ves čas sklicuje. Pri tem dopolnjuje vsebino človekovih pravic, urejenih z Ustavo, z vsebinami, ki jih je z razlago dalo sodišče v Strasbourgu evropski konvenciji, in pogosto uporablja razloge tega sodišča kot dopolnilne razloge pri svoji razlagi ustavnih določb. Tudi to je posebno sredstvo, ki omogoča izognitev nasprotjem med ustavnim in mednarodnim pravom in ki v tem primeru preprečuje obsodbo države zaradi kršitve človekove pravice pred Evropskim sodiščem za človekove pravice.